Biographie Boily Marie-Louise
Marie-Louise Boily s'appelait aussi Soeur Marie de l’Incarnation. Après le décès de son mari, en 1900, elle joignit la communauté des soeurs Hospitalières de l’Hôtel-Dieu du Sacré-Coeur de Jésus à Québec.
Le Monastère des Augustines (l'Hôpital général) est situé au 260, boul. Langelier, Québec. Ce lieu est « très historique » (y ont vécu des Récollets, Frontenac et Mgr de Saint-Vallier). Il a été protégé des grands feux en raison de son éloignement de la ville. On peut aussi y visiter le cimetière où sont enterrés de nombreux militaires français et anglais morts au combat de 1759. Les blessés avaient été soignés par les soeurs de l'Hôpital général. Le corps de Montcalm y a été tranféré en 2001. Non loin de là, se trouve aussi un moulin à farine érigé en 1702 pour subvenir aux besoins des religieuses et de leurs patients.
Le texte ci-après est tiré intégralement du site Web de la peintre Nicole Tremblay qui a conçu en 1997 une magnifique toile intitulée Mon arrière-grand-mère religieuse cloîtrée (Hauteur : 6 pi, Largeur : 3 pi, Profondeur : 4 po; Acrylique, sable et feuille d'or sur toile) :
"Originaire de Jonquière, l’artiste Nicole Tremblay nous raconte ici l’histoire passionnante et sévère de Marie-Louise Boily-Brassard, sa bisaïeule maternelle, une amazone née à Chicoutimi le 20 décembre 1857, dans le rang Saint-Pierre. Unique enfant survivante des 16 grossesses de sa mère (incompatibilité sanguine entre la mère et les foetus), Marie-Louise se voit refuser à trois reprises, par ses parents, la permission d’entrer en religion.
Qu’à cela ne tienne, sous le coup de la colère elle épouse en 1873 Joseph Brassard, l’ouvrier agricole de la ferme paternelle. La frise 1 dépeint la mariée en blanc, sur un fond qui laisse deviner quelque drame : la cathédrale de Chicoutimi et l’église de Chambord supervisent et dominent la scène. Marie-Louise donnera naissance à neuf enfants dont seulement cinq survivront comme en témoignent les quatre croix, entre les enfants logés dans ses entrailles. La chaise roulante nous avise que l’époux devient paraplégique en 1883, sur leur ferme de l’île d’Alma, où la famille a emménagé en quittant Chicoutimi, après le décès des parents de Marie-Louise et de quatre de ses très jeunes enfants. La frise 5, au bas de l’oeuvre, symbolise d’ailleurs les neuf grossesses de Marie-Louise.
Tout en étant convaincue qu’elle reçoit le juste retour de sa révolte d’il y a dix ans, elle rassemble ses énergies et parvient à faire fonctionner la ferme avec Henri, le fils aîné à peine âgé de sept ans. Dans une monographie consacrée à cette ancêtre héroïque au destin singulier, le chicoutimien Henri Bouchard, fils de sa fille Marie-Jeanne, écrira au sujet de sa grand-mère maternelle : « Ses enfants reconnaissent que c’était une femme forte moralement et physiquement. On raconte que, pour elle, transporter un sac de cent (100) livres de sucre ou de farine, c’était relativement facile. »
Âgé d’un peu moins de 16 ans, l’aîné Henri s’exile pour travailler aux États-Unis, d’où il enverra ses économies à sa mère durant six ou sept ans. Au cours de ces années, la famille déménage à Chambord, où Marie-Louise mènera une vie laborieuse : tenancière de magasin général, bricoleuse, fermière, couturière, boulangère, cordonnière, laboureuse, sans oublier un à-côté avec la tonte des moutons. Mais en haut, à droite, posé sur un solide contrefort rocheux, un cloître d’Augustines l’attend quelque part à Québec, dans le quartier Saint-Sauveur.
En 1900, à 43 ans, Marie-Louise devient veuve et grand-mère pour la première fois d’un fils d’Henri, devenu Harry à son retour au Québec quelques mois plus tard. La frise 2, nous montre la progéniture de notre Pasionaria au moment où elle entre au noviciat des soeurs Hospitalières de l’Hôtel-Dieu du Sacré-Coeur de Jésus, à Québec, le 4 novembre 1903 : Joseph, 16 ans qu’elle confiera à Harry l’aîné de 27 ans, Marie-Jeanne, 19 ans, et Émilie-Anne, 18 ans, la grand-mère maternelle de Nicole Tremblay. À droite, on voit Welley, 21 ans, seul à New York, alors que sa mère quitte Chambord en train pour le noviciat de Québec, symboliquement vêtue du costume des suffragettes anglaises. Seuls Welley et Marie-Jeanne n’avaient pas été avisés de l’entrée en religion de leur mère.
À travers tout cela, les amours terrestres ont suivi leur cours : Marie-Jeanne et Émilie-Anne épousent deux frères Bouchard d’origine jonquièroise, soit Joseph-Thaddée avec Marie-Jeanne, en 1902, et Louis avec Émilie-Anne, en avril 1904. En 1907, ces derniers donneront naissance à Germaine, la mère de l’artiste. Le fils Welley, revenu des États-Unis en 1905, accepte peu à peu la perte de sa mère qui a prononcé ses voeux perpétuels. Bref, tous se marièrent et eurent de nombreux enfants, dont certains défilèrent au parloir du cloître en compagnie de leurs parents. Après une dizaine d’années de vie monastique, Soeur Marie de l’Incarnation subit une délicate intervention du coeur qui la laissera fragile durant les 15 dernières années de sa vie. Elle délaissera alors les serres pour se consacrer aux ouvrages de dame.
Tirée des différents albums de famille, la frise 3 nous montre comment la pellicule a fixé quelques rencontres de famille. À gauche, en 1921, notre révérende Soeur en compagnie de sa fille Émilie-Anne, suivi d’un portrait de famille où l’on retrouve la Soeur, la petite Gertrude, Louis Bouchard et Émilie-Anne enceinte qui mourra quelques mois plus tard, cinq jours après avoir donné la vie à Solange Bouchard-Bérubé.
Dans une lettre adressée le 23 mars 1921 à sa fille Marie-Jeanne, Soeur Marie de l’Incarnation écrit : « Il nous a été présenté une croix bien lourde et bien cruelle … Voir la petite famille qu’elle laisse en si bas âge et si nombreuse est sans doute le spectacle le plus affligeant que l’on peut contempler avec des yeux navrés de douleur et de larmes bien amères … En attendant d’aller rejoindre ceux qui nous ont devancés, ne nous attachons pas à cette terre ingrate qui renferme tant de deuils et tant de déchirements douloureux … »
À droite, la Mère en compagnie de ses quatre enfants, quelques jours avant son décès survenu le 1er juillet 1929. À l’extrême droite, Bernadette, fille d’Émilie-Anne, visitant sa grand-mère, et qui deviendra elle-même nonne enseignante sous le nom de Soeur Raymond-Marie.
Le centre de la frise 4 nous présente le veuf Louis Bouchard en compagnie de six de ses enfants. Le berceau d’époque rappelle que le bébé absent (Solange) a été adopté par l’oncle Welley. La petite Gertrude, elle, sera adoptée par un oncle du peintre Arthur Villeneuve. Le tableau de gauche, datant de la fin des années 40, représente Germaine, la mère de l’artiste, en compagnie de ses trois enfants, Pierre, Nicole et Damien Tremblay. Enfin, le tableau de droite dévoile une autre génération issue en droite ligne de Soeur Marie de l’Incarnation : Roxane et Rafaël Chamberland, rejetons de l’artiste.
Ce survol bref et incomplet à travers l’arbre de vie de Soeur Marie de l’Incarnation veut tout au plus rendre hommage à une suffragette méconnue qui a mené un combat à sa façon, couronnée de trois états d’âme : fleurs de jeunesse, fleurs de défi et fleurs spirituelles. La passion, comme la vie, échappe à toute logique étroite et les fous de Dieu ont toujours su faire fi des frictions apparentes entre vie terrestre et vie céleste.
Soeur Marie de l’Incarnation rejoint les grands au panthéon de l’humanité. Avant de renouer avec les idéaux de son enfance, elle a donné la vie à neuf enfants. C’est énorme quand on considère que souvent les statues de héros, érigées par l’histoire, reposent sur un piédestal dont la hauteur est directement proportionnelle au nombre d’humains que ces grands hommes ont envoyé à la mort …"
Damien Tremblay Le 7 avril 1997
Source : http://www.nicoletremblaypeintre.com/grand%20mere.htm. Voir la vidéo HISTOIRES OUBLIÉES (2006), « Le secret de Marie-Louise » sur cette page : http://www.nicoletremblaypeintre.com/entrevue_tv.html
Voir aussi quelques extraits de la vidéo précitée qui fut diffusée par Radio-Canada : http://www.histoiresoubliees.ca/article/le-secret-de-marielouise
|