Biographie Lafleur Alphonse
Lafleur, c'est une véritable histoire de famille. D'abord, celle du fondateur, Alphonse,
puis celle de son épouse, Oliva, et enfin celle de la plupart de leurs descendants.
Cette famille a, comme on dit, laissé sa marque. Au fil des 100 dernières années,
elle a réussi à implanter ses produits sur la table de millions d'autres familles québécoises.
Est-ce le doux nom de Lafleur? Est-ce la vision ou l'ambition de son
fondateur? Est-ce la qualité et le goût des produits? Ou est-ce encore
le fait que les membres de la famille ont mis la main à la pâte qui fait
que cette marque, créée par un boucher artisan de la 5e Rue du quartier
de Limoilou, à Québec, en 1912, est aujourd'hui présente sur tout le
territoire québécois? C'est un peu de tout cela.
La première enseigne
Les ancêtres des Lafleur se perdent dans la généalogie du peuplement
de la Nouvelle-France. Beaucoup s'établissent dans la région de Québec,
à Lotbinière notamment. Mais c'est en 1882, dans le village de
Saint-Gilles, que Napoléon Lafleur et Clarisse Chamberland donnent le
jour à Alphonse Lafleur. Napoléon meurt prématurément et Alphonse se
retrouve, à huit ans, orphelin de père dans un milieu agricole où il
faut travailler dur pour joindre les deux bouts. Cela éveillera sans
doute son indépendance et sa débrouillardise. Le 25 avril 1903, âgé de 21
ans, Alphonse épouse Oliva Plante dans l'église de la paroisse de
Saint-Isidore-de-Dorchester, en Beauce. Il a déjà choisi le métier de
boucher et en fera sa passion, estimant qu'il y a toujours eu des
gourmets et qu'il y en aura toujours.
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Alphonse et Oliva Lafleur |
En 1911, la famille est installée à Québec. Alphonse achète un
terrain et une bâtisse dans la 5e Rue de la paroisse Saint-Roch, à
Limoilou. Il choisit ce secteur parce que les bâtiments sont desservis
par des ruelles dans lesquelles peuvent circuler les voitures de
livraison, dont beaucoup sont encore tirées par des chevaux.
En 1912, les avantages du développement urbain dans Limoilou font
exploser la population, ce qui renforce l'ambition d'Alphonse Lafleur
d'y établir un commerce. Une affiche discrète annonce enfin : ALP.
LAFLEUR — BOUCHER — SAUCISSE & VIANDE DE CHOIX.
L'établissement est avant tout une charcuterie, mais les ménagères
de l'époque, à la tête de familles nombreuses, y trouvent également des
légumes frais, des produits en conserve ou encore des œufs. À une époque
où les moyens de conservation sont peu développés et où les équipements
de réfrigération sont un luxe, on achète le plus frais possible, et la
boucherie d'Alphonse et Oliva produit chaque jour pour répondre aux
besoins de la population locale. La fraîcheur deviendra l'emblème de
leur commerce.
En ce début du XXe siècle, les prénommés Alphonse ont une bonne
étoile pour les affaires. En effet, à peine 10 ans plus tôt, en 1900,
Alphonse Desjardins jetait les bases de son mouvement à Lévis, de
l'autre côté du fleuve Saint-Laurent. Alphonse Lafleur venait lui aussi
d'ouvrir un commerce dont personne ne soupçonnait encore qu'il
traverserait le siècle. Le fils de Napoléon Lafleur était devenu
boucher-charcutier et son commerce avait pignon sur rue. Il avait
conscience de pratiquer un métier noble et utile. Le petit orphelin de
Saint-Gilles s'était très bien débrouillé. Mais sa femme, Oliva, et lui
sont déjà trop occupés pour penser que leur modeste commerce sera à
l'origine d'une beaucoup plus grande aventure.
Une histoire de famille
Malgré le déclenchement de la Première Guerre mondiale, le commerce
d'Alphonse Lafleur prend de l'expansion. La famille aussi s'agrandit.
Les enfants naissent et, dès leur plus jeune âge, les étalages de la
charcuterie sont autant leur terrain de jeu qu'un lieu d'apprentissage
de la vie. Jean-Marie, Gérard, Raymond, Georges-Henri prendront un jour
la relève d'Oliva et d'Alphonse. C'est écrit dans le ciel. Plus les
années vont passer, plus les enfants seront associés à l'entreprise
familiale.
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Le premier camion motorisé |
La renommée de l'établissement va croissant et Alphonse dirige une
bonne équipe de bouchers. On travaille dur et on prépare tous les jours
galantines, graisse de rôti, cretons, tête fromagée et boudin. Mais
c'est surtout à la saucisse Lafleur que le commerce doit l'augmentation
constante de sa fréquentation. La recette de son succès se trouve dans
le choix et le mélange minutieux des épices, qui lui donnent un arôme et
un goût qui séduisent les papilles. Le bouche à oreille fait le reste
et on vient désormais de l'extérieur de Limoilou pour se procurer les
fameuses saucisses. Elles sont tellement appréciées des acheteurs
qu'Alphonse en fait son produit-vedette. Il fait imprimer des cartes de
visite sur lesquelles on peut lire, d'abord et avant tout : SAUCISSE
LAFLEUR.
Dès 1913, Alphonse a commencé à acquérir les lots adjacents à son
commerce. Il fera de même en 1920, ce qui lui permet d'augmenter la
surface de la charcuterie. Comme la Première Guerre a pris fin et que la
période de paix qui s'annonce ne peut que favoriser le maintien et le
développement des affaires, le père, la mère et les fils, désormais
devenus de jeunes hommes, donnent un nouvel élan à l'activité familiale.
Il y aura dorénavant plus de bras et plus de têtes dans le clan
Lafleur. Pourtant, même si le commerce devient beaucoup plus important
et accaparant, les valeurs d'origine ne changent pas. C'est ainsi qu'on
offre toujours des viandes de choix, des charcuteries dont la fraîcheur
est le premier ingrédient, des goûts uniques qui deviennent la signature
de la maison et, enfin, un service empressé et exceptionnel.
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Alphonse, dans sa boucherie, entouré de ses employés |
En 1930, la Grande Crise vient freiner les ardeurs de
développement du commerce. Le chômage augmente partout et la ville de
Québec n'est pas épargnée. On achète moins, mais il faut tout de même se
nourrir. Cela n'empêche pas l'entreprise de faire désormais des
livraisons par camion. C'est aussi l'époque où Alphonse pose fièrement
dans son commerce, entouré de ses employés, commis et bouchers, tous en
cravate s'il vous plaît, pour le plaisir d'un photographe qui va
immortaliser la scène. Une des rares photos du commerce. On y vend
encore d'autres produits que la viande, comme des salades, mais
également des œufs frais à boire. On y voit même les longs rubans
adhésifs pendant du plafond qui servaient dans ces années à attraper les
mouches avant qu'elles aillent se poser ailleurs. La Grande Dépression
finira par passer et le commerce d'Alphonse va encore une fois résister.
Les membres de la famille consolident l'entreprise et chacun y
apporte ses qualités. On peut dire, sans jeu de mots, que la marque
fleurit. Bien avant le marketing et la publicité, la saucisse Lafleur
est de plus en plus connue comme « la fleur des saucisses ». Et cette
jolie inversion de mots deviendra le socle de la marque. Plus tard,
cette image se reflétera dans le logo, lorsqu'on ajoutera cinq pétales
rouges sur le « u » de Lafleur. Ce logo, encore aujourd'hui, se présente
comme l'identité des produits Lafleur.
Alphonse s'en va, la famille reste
Rien ne semble vouloir arrêter la croissance de l'entreprise.
Pourtant, un jour d'hiver, en février 1934, le fondateur s'éteint.
Alphonse meurt à 52 ans. Ses funérailles sont solennelles et le
corbillard qui porte sa dépouille, tiré par deux chevaux, lui fait
emprunter une dernière fois la 5e Rue et passe devant le commerce qu'il a
mis la plus grande partie de sa vie à bâtir. Les employés, les amis et
les clients lui rendent un dernier hommage.
Son épouse, Oliva, et ses fils héritent du commerce. Alphonse leur a
montré le chemin à suivre. Après la mort du fondateur, Oliva est
légataire universelle et devient présidente de l'entreprise. Le commerce
devient une société dotée d'un capital-actions de 20 000 dollars, soit
200 actions de 100 dollars chacune.
Les enfants Lafleur prennent la barre
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Deux des fils Lafleur |
De 1934 à 1940, les héritiers, sous la gouverne de la mère, Oliva,
poursuivront les activités du commerce. Pendant ces années, on parle
d'un nouveau conflit en Europe. L'invasion de la Pologne par les troupes
de Hitler déclenchera finalement la Deuxième Guerre mondiale. La
famille Lafleur s'adapte, comme toutes les autres, et son commerce
aussi. On se dit que la paix finira bien par arriver.
En 1942, malgré ce climat, l'entreprise, qui s'était jusqu'alors
confinée dans le secteur du porc, décide de se diversifier en se lançant
dans l'abattage de bœufs et de veaux. En 1943, elle achète de nouveaux
terrains et acquiert même des bâtiments qui sont toujours propriété de
la mère, Oliva. Cette dernière, qui s'était remariée en secondes noces
avec Joseph Duquet, en 1939, passe la main et cède par la même occasion
ses actions de l'entreprise à ses enfants.
En 1944, les fils Lafleur sont désormais seuls à la barre. L'avance
des forces alliées en Europe annonce la fin du conflit. Le 6 juin 1944
se tient une assemblée des administrateurs de l'entreprise au cours de
laquelle les fils Lafleur — Raymond, désormais président, et Gérard,
trésorier — distribuent de nouvelles fonctions aux membres de la
famille. C'est aussi le jour J, celui du débarquement en Normandie, qui
marquera le début de la fin de la Deuxième Guerre mondiale et
débouchera sur un boum démographique et économique pour les 25
prochaines années. Toutefois, deux mois après la fin de la guerre, le 29
juillet 1945, la famille est de nouveau en deuil. La matriarche, Oliva,
ex-présidente et actionnaire de l'entreprise, s'éteint à l'âge de 64
ans. Une page d'histoire vient de se fermer.
De commerce à entreprise
Si l'année 1945 représente un tournant dans l'administration de la
charcuterie, elle marquera également la transition entre le commerce
d'Alphonse et l'entreprise que ses descendants ambitionnent de
développer. C'est l'année où l'on réalise la première rénovation
importante de la maison. Dans les années subséquentes, les fils Lafleur
recourront à plusieurs emprunts pour procéder chaque fois à d'autres
agrandissements, à d'autres modernisations ou à l'achat de nouveaux
équipements.
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Au début des années 1960, Lafleur modernise ses équipements. |
En 1955, après une décennie de transformations, le commerce d'Alphonse a
atteint la taille d'une entreprise respectable et moderne, employant
plus de 80 personnes. On ne fait plus seulement dans le détail, mais
aussi dans le gros. On sert toujours les familles de Limoilou et des
environs, mais on fournit également les restaurants, les hôtels, les
communautés religieuses et les hôpitaux. Le nom de Lafleur s'affiche
désormais non plus sur quelques camions de livraison, comme avant la
guerre, mais sur un parc de véhicules modernes qui sillonnent les rues
et les routes de toute la grande région de Québec, sur la rive nord du
fleuve comme sur la rive sud.
Lafleur a 50 ans
En 1956, on augmente le capital-actions de l'entreprise, le faisant
passer de 20 000 à 120 000 dollars. On se sert désormais des grands
quotidiens de Québec, comme Le Soleil, pour annoncer les produits
Lafleur: boudin, cretons, tête fromagée, jambons, etc. On distribue les
produits de la marque dans les épiceries et les boucheries de la
région.
En 1961, à l'aube de la Révolution tranquille, on est à la veille de
célébrer le 50e anniversaire de l'entreprise. On agrandit encore.
Toutefois, cet anniversaire est assombri par le décès, le 2 août 1961,
du président de l'entreprise, Raymond Lafleur. Il en était l'âme
dirigeante depuis 1943, année où il avait pris le relais de sa mère.
Lorsqu'elle célèbre ses 50 ans, l'entreprise est en
plein essor. Désormais désigné comme une usine, l'établissement Lafleur
compte un centre de préparation des commandes, des services de
charcuterie, de salaison et de cuisson ainsi que des fumoirs, des
sections réservées au cartonnage et à l'emballage. Il est équipé de
compresseurs, de congélateurs et de chambres froides. Les murs, les
portes et les équipements sont en acier inoxydable. L'entreprise répond
maintenant aux exigences de qualité et d'hygiène dorénavant requises
pour faire partie d'une industrie agroalimentaire elle aussi en pleine
révolution.
Pour l'entreprise familiale des Lafleur, la décennie 1960 sera au
diapason de ce qu'elle a été pour l'ensemble du Québec, c'est-à-dire une
période de profonds changements. L'entreprise continue de croître et
ses produits sont de plus en plus populaires. Mais le 8 août 1967, alors
qu'il est toujours président, Gérard Lafleur s'éteint, et son décès
entraîne une réorganisation de la direction. En 1968 et en 1969, des
décisions importantes pour l'avenir seront prises, comme celle de cesser
le commerce de détail pour se concentrer sur la vente en gros des
produits de charcuterie et la transformation des viandes, ou encore
celle de mettre fin aux activités d'abattage de veaux et de bœufs. En
novembre 1970, on signe la première convention collective.
À l'aube des années 1970, plusieurs autres entreprises
agroalimentaires ambitionnent également de s'emparer d'un marché en
pleine mutation. C'est l'époque où se multiplient les grandes chaînes de
distribution alimentaire en mesure de répondre aux besoins des
consommateurs urbains toujours plus nombreux. On travaille plus, on
gagne un meilleur salaire et on se tourne de plus en plus vers les plats
préparés et les chaînes de restauration. La télé, la radio, l'affichage
sont en train de révolutionner la façon de faire connaître et de vendre
ses produits dans des marchés plus étendus et plus compétitifs. Après
60 ans d'engagement total envers l'entreprise familiale, les héritiers
Lafleur, maintenant entourés d'administrateurs externes, envisagent
diverses options pour maintenir le rythme de croissance et se donner les
moyens de conquérir des marchés bien au-delà de la région de Québec.
C'est alors que, le 14 février 1972, une occasion se présente.
Alphonse Lafleur Limitée reçoit une offre d'achat de J.N. Brochu Inc.,
une entreprise agroalimentaire de Lévis. Deux semaines plus tard, soit
le 1er mars 1972, cette offre est acceptée. L'avenir de la marque
Lafleur est dès lors assuré.
D'une famille à l'autre : des Lafleur aux Brochu
Il y a un parallèle à dresser entre le fondateur de Lafleur et celui
de J.N. Brochu Inc., nouvel acquéreur de l'entreprise et de la marque.
Ils viennent tous les deux de la même région et, tout comme Alphonse
Lafleur, Joseph-Napoléon Brochu est issu du milieu agricole. Alors
qu'Alphonse a ouvert les portes de sa boucherie en 1912, c'est un an
plus tard, en juillet 1913, que Joseph-Napoléon Brochu a racheté le
commerce de son père Gilbert, à Saint-Henri-de-Lévis, sur la route
Campagna. On y échangeait des produits agricoles contre d'autres
produits nécessaires à la vie courante.
De comptoir à magasin général, le commerce des Brochu se développe
et est prospère. La clientèle agricole est importante, et les
agriculteurs se modernisent et produisent de plus en plus sur une
échelle commerciale. Joseph-Napoléon Brochu estime qu'il doit répondre à
ces changements. En 1954, il fait construire une meunerie, voisine de
son magasin, grâce à laquelle il pourra offrir des produits spécialisés
destinés à l'alimentation animale.
C'est autour de ce noyau central d'activités au service du monde
agricole que naîtra, au début des années 1960, grâce à l'impulsion et à
l'implication d'André et de Donald Brochu, les deux plus jeunes fils du
fondateur, une entreprise qui n'aura de cesse de se diversifier et de
croître, et que l'on désignera jusqu'à aujourd'hui sous le nom de Groupe
Brochu. Tout comme les Lafleur, les enfants Brochu hériteront du sens
des affaires de leur père – qu'ils transmettront par la suite à leurs
propres enfants. C'est en 1961 qu'ils se portent acquéreurs de
l'entreprise familiale, composée alors d'un magasin général, d'une
meunerie et d'un petit abattoir. Une base d'affaires solide, à laquelle
participeront activement pendant de nombreuses années Sylvio et
Paul-Henri Brochu, les frères d'André et de Donald.
Durant les années qui les séparent de l'acquisition d'Alphonse
Lafleur Limitée, les frères Brochu développeront l'entreprise à un
rythme soutenu. On ajoutera de nouvelles divisions. En 1967, c'est la
création des Salaisons Brochu inc., un abattoir situé à
Saint-Henri-de-Lévis, agrandi 20 fois, devenu aujourd'hui une des usines
de transformation les plus modernes d'Olymel, et qui héritera de la
marque Lafleur. L'entreprise produira rapidement 100 millions de livres
de porc chaque année.
L'envol de la marque Lafleur
En 1972, au moment où le contrat d'achat d'Alphonse Lafleur Limitée
est conclu, les dirigeants des Salaisons Brochu, notamment André,
nourrissent de grandes ambitions. L'entreprise est, entre autres, le
premier abattoir québécois à exporter ses produits au Japon.
L'acquisition des actifs de la famille Lafleur accélérera le
développement du secteur de l'abattage et de la transformation des
viandes. On agrandit l'usine de Saint-Henri-de-Lévis et on y installe de
l'équipement à la fine pointe de la technologie.
À la fin des années 1970, on consolide les activités de Lafleur avec
celles des Salaisons Brochu. Cette intégration comprend le transfert
des équipements d'Alphonse Lafleur Limitée et la vente des bâtiments et
terrains de Limoilou. De nombreux employés d'Alphonse Lafleur traversent
le pont. On embauche plus de 150 personnes supplémentaires, et l'usine
tourne à plein régime pour fabriquer des émulsions, des jambons, du
bacon et des saucisses fumées.
À partir de là, la famille Brochu donnera des ailes à la marque
Lafleur. Ses produits entreprendront une conquête en règle du marché
montréalais dès le début des années 1980. On construira même un centre à
Laval, en 1985, pour faciliter la distribution des produits. Rien
n'empêche plus la marque de conquérir tout le Québec.
En 1984, on avait décidé de rajeunir le logo qui ornait les produits
de la marque. La nouvelle signature, où l'on vient coiffer le « u » de
Lafleur de cinq pétales rouges, s'inspire de l'expression du fondateur,
Alphonse, qui estimait préparer « la fleur des saucisses ». Cette
nouvelle image de marque fut lancée en grande pompe en 1984.
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Des membres
de la famille Brochu |
Entre les mains de la famille Brochu, les produits
Lafleur serviront aussi de vecteur d'innovations importantes, comme les
viandes tranchées préemballées, le porc mariné (qui fait découvrir de
nouvelles saveurs exotiques aux consommateurs québécois), les
feuillantines de jambon style Forêt-Noire, au miel ou à l'érable, ou
encore des initiatives audacieuses sur la traçabilité des produits.
Le bacon sera également un produit phare de la marque Lafleur.
Fabriqué jusque-là à l'usine de Saint-Henri-de-Lévis, ce produit est
tellement populaire que la demande justifiera, en 1984, la création de
la division Les Charcuteries Prince Ltée, dont ce sera la spécialité.
Cette division, créée par André Brochu, deviendra plus tard Les Aliments
Prince. Le secteur du bacon se développera tellement rapidement qu'il
finira par mobiliser trois usines, soit celles de Princeville et de
Drummondville, au Québec, et celle de Cornwall, en Ontario. Là encore,
on innovera, en étant les premiers au Canada à se lancer dans la
fabrication du bacon précuit.
Dans les années 1990, la célèbre marque Lafleur sera aussi soutenue
par la création de plusieurs nouvelles divisions, comme Déliham,
Excelham ou Les Viandes Ultra Meats, ou encore par l'acquisition de
nouveaux abattoirs. Ces derniers fournissent notamment Lafleur en
matière première, alors que les autres, comme Déliham, transforment les
produits de la marque et en élaborent d'autres pour élargir l'éventail
de la gamme.
Au début des années 1990 également, l'entreprise marque
véritablement un but en convainquant le hockeyeur Guy Lafleur de devenir
le porte-parole publicitaire des saucisses « La Bonne Fourchette », une
marque de la gamme Lafleur.
Le « Démon blond » du Canadien, comme on le surnomme, propulsera
encore plus haut la notoriété de Lafleur. Au début des années 2000, la
marque fait désormais partie du paysage de l'alimentation québécoise.
De Brochu à Olymel : de la ferme à la table
Plusieurs générations d'entrepreneurs, Lafleur et Brochu, ont permis
à la marque Lafleur de franchir le cap du XXIe siècle. Elles ont
perpétué l'esprit des fondateurs et se sont adaptées à tous les
changements pour conserver aux produits Lafleur leur caractère
authentique. Le mot « authentique » deviendra d'ailleurs la signature
d'une gamme de produits Lafleur en 2009.
En 2004, Supraliment, division du Groupe Brochu qui regroupe toutes
les activités d'abattage et de transformation des viandes et dont le
joyau demeure la marque Lafleur, occupe donc une place enviable sur les
marchés intérieur et d'exportation, devenus toutefois de plus en plus
concurrentiels. Elle n'est pas la seule entreprise à faire ce constat et
à chercher le moyen de renforcer sa position stratégique. Olymel,
société en commandite créée en 1991 par La Coop fédérée et sous laquelle
on a regroupé toutes les activités de transformation des viandes de
porc et de volaille de la coopérative, est également à la recherche d'un
partenaire.
Les directions des deux entreprises partagent la même vision. Elles
se connaissent déjà, puisqu'en 2002 Olymel s.e.c. était devenue
partenaire des Aliments Prince en acquérant 50 % des actifs de cette
dernière dans la production de bacon. Elles sont toutes deux issues du
monde agricole et entretiennent des liens très forts avec ce milieu.
Olymel
est une filiale détenue majoritairement par La Coop fédérée, mouvement
coopératif redevable à plus de 90 000 membres. Dans leur trousseau
respectif, Olymel et Supraliment disposent toutes deux de marques
distinctives et fortes : Olymel et Flamingo pour Olymel s.e.c., et bien
sûr Lafleur et Prince dans le cas de Supraliment, du Groupe Brochu. La
complémentarité, la synergie et l'intérêt stratégique sont au
rendez-vous. L'approche choisie sera la fusion, et en avril 2005, après
le feu vert du Bureau de la concurrence du Canada, le
président-directeur général d'Olymel s.e.c., Réjean Nadeau, et le
vice-président exécutif de Supraliment, Laurent Brochu, officialisent
ce mariage. Cette transaction permet alors au Groupe Brochu de devenir
actionnaire de la société en commandite Olymel, avec La Coop fédérée et
la Société générale de financement (SGF).
Vers un nouveau siècle
La marque Lafleur a donc 100 ans en 2012. Olymel s.e.c., nouveau
fiduciaire de cette grande marque, a été créée il y a 20 ans par La Coop
fédérée. Toutes ces entreprises et les personnes qui les ont dirigées
et animées ont fait le pont entre le Québec d'hier et celui
d'aujourd'hui. Elles ont tour à tour renforcé et maintenu le lien le
plus direct possible entre la ferme et la table des consommateurs.
Au début de la deuxième décennie du XXIe siècle, la marque Lafleur
est donc un des vaisseaux amiraux d'Olymel, une entreprise moderne, chef
de file canadien dans l'abattage, la découpe et la transformation
agroalimentaire des viandes de porc et de volaille. Son chiffre
d'affaires dépasse les deux milliards de dollars chaque année, et elle
exporte à l'étranger près de 50 % de ses produits. Elle emploie plus de
9000 personnes, dont plus de 7000 au Québec, et est également bien
implantée en Alberta, en Ontario et maintenant au Nouveau-Brunswick.
Les produits de la marque Lafleur ont un bel avenir devant eux. Ils
sont élaborés à partir de viandes de première qualité, dans des
établissements ultramodernes, et selon les standards les plus élevés de
fabrication, de salubrité et de biosécurité. Des milliers d'employés —
tant ceux de la production que ceux de la recherche et développement, du
contrôle de la qualité, de l'emballage, du marketing et de la
distribution — veillent à ce que les produits Lafleur soient à la
hauteur de la réputation acquise au fil des 100 dernières années. Qu'il
s'agisse de jambons, de saucisses, de bacon ou de tous les produits de
charcuterie qui portent fièrement le nom de Lafleur, les employés
d'Olymel ont maintenant pris la relève d'Alphonse.
Si la marque Lafleur a continué aussi longtemps à accompagner toutes
ces générations, c'est que celui qui l'a créée, en 1912, s'inspirait
lui-même des traditions héritées de sa propre famille et de son temps :
des viandes dont la fraîcheur est la qualité première, des produits
fournis par les meilleures fermes d'élevage, des recettes inspirées du
terroir – comme celles de la tête fromagée ou du boudin et, bien sûr, des fameuses saucisses d'Alphonse Lafleur. Tout cela résistera encore au temps.
La marque a rallié les générations successives en continuant de
porter le nom de Lafleur et en ne perdant jamais de vue ses origines et
ses racines. Tous ceux qui ont pris le relais d'Alphonse Lafleur, depuis
ses héritiers jusqu'à la famille Brochu et à Olymel aujourd'hui, ont su
préserver cet héritage et le faire fructifier.
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